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News
14 décembre 2019

Depuis plusieurs semaines, et plus particulièrement depuis le refus du gouvernement de s’associer au Dry January à la française, le tamtam médiatique sur les réseaux sociaux ou les supports audiovisuels, résonne des prises de positions d’un « consortium d’associations » pour condamner en des termes parfois assez fleuris et même violents cette décision de refus, pour stigmatiser et discréditer la proposition d’un mois sobre d’une patiente experte et pour inciter au maintien du mois sans alcool sur une base associative.

S’y opposer serait se rendre complice des 41.000 morts attribués à l’alcool (argument imparable). Les « alcooliers » seraient même « promoteurs du cancer » !.

Et bien évidemment ce « consortium d’associations » affirme la main sur le cœur depuis que le gouvernement a botté en touche, que la proposition qu’il porte n’est nullement du même acabit que le mois sans tabac, que l’idée n’est nullement d’imposer une abstinence totale. Il est quand même intéressant de noter que ce « consortium d’association » (non ce n’est pas un lobby, voyons, puisqu’il prêche pour le bien et la santé de la population) diffuse toute une panoplie de mesures qui, c’est un hasard, sont les mêmes que celles mises en œuvre pour éradiquer la consommation de tabac : augmentation des prix, mois sans consommation, suppression de la publicité…..Mais non, ce n’est pas le même combat. Et si le refus du gouvernement n’était fondé que sur la volonté de ne pas instrumentaliser cette proposition en laissant les français y souscrire selon leur conscience.

Dans le même temps différents articles sont publiés pour contester cette attitude de dire ce qui est bon et ce qui est mal, ou pour rappeler tout ce qui est lié à la culture du vin. En réaction, le « consortium d’associations » doute de l’honnêteté intellectuelle des auteurs, on leur reproche de ne pas mettre en avant les dommages que cause l’alcool, on les accuse de mauvaise foi. S’opposer au Dry January serait s’opposer au droit et à la liberté de chacun de tester une non-consommation durant un mois. Ce serait obliger à consommer.

Et bien évidemment tout cela serait l’œuvre de ce lobby alcoolier bien connu et si puissant. Là encore se serait s’associer aux dommages d’une consommation immodérée d’alcool.

Certains ont le droit de mettre en garde contre les dangers de l’alcool mais les autres doivent cesser de dire le bien qu’ils pensent de la culture du vin en France.

La liberté d’expression qui est un des piliers de notre démocratie doit conduire à laisser chacun exprimer son opinion. L’article 11 de la déclaration des droits de l’homme et des citoyens érige en principe fondamental que la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. Laisser le « consortium d’associations » mettre en place son mois sans alcool doit être respecté, tout comme laisser certains intellectuels dirent tout le bien qu’ils pensent du vin.

Ce qu’on peut constater, en suivant avec attention (et parfois une certaine lassitude) l’ensemble des prises de positions de part et d’autres sur le vin et la consommation d’alcool, c’est que la rigidité de certains entraine la réaction des autres et par un effet de quasi réaction chimique, chacun monte dans ses tours et adopte des positions aussi radicales que, parfois, excessives.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’écrire ici, une certaine modération dans l’expression des idées pourrait, peut-être, permettre d’arriver à un dialogue (au lieu d’un affrontement stérile) pour construire une vraie et efficace réponse aux dommages que peut causer une consommation d’alcool non maîtrisée, ou une consommation par une population à risque. Et franchement dire que l’ensemble des viticulteurs, l’ensemble des salariés et indépendant qui travaillent dans ce secteur des boissons alcoolisées, sont des promoteurs du cancer et qu’ils ont une responsabilité morale pour les 41.000 morts, c’est peut-être un peu violent, non ?

Parler de vin et de boissons alcoolisées n’est pas, obligatoirement en faire la publicité et inciter à une consommation immodérée. La population française n’est pas uniquement constituée d’enfants ou d’abrutis incapables de comprendre ce qui bon et moins bon pour leur santé et leur comportement.

Il serait bon, pour le débat public, d’appliquer la phrase prêtée à Voltaire : Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire.

C’est pas gagné sur ce sujet de la consommation d’alcool comme sur d’autres sujets.

 

14 décembre 2019

Olivier Poulet

Maitre Olivier Poulet
Avocat au Barreau de Rennes

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