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News
30 octobre 2019

Par une indiscrétion du Journal du Dimanche, on apprend que Madame Buzyn, notre Ministre de la santé vient de bannir le vin de la cantine du ministère.

Sur quel fondement juridique ? Mystère. Il faut rappeler que l’article Article R4228-20 du code du travail prévoit que le vin, la bière, le cidre et le poiré sont autorisés sur le lieu de travail, mais que lorsque la consommation de ces boissons est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur peut prévoir dans le règlement intérieur ou, à défaut, par note de service les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d'accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d'une limitation voire d'une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché. Il devait y avoir péril pour la conduite des affaires de santé publique.

Evidemment cette indiscrétion a suscité un certain émoi et les réseaux sociaux ont résonné de réactions diverses. Du côté des producteurs de vin, on regrette cette mesure au nom de la convivialité. Du coté des protecteurs patentés de la santé publique, on se félicite de cette mesure et on se gausse de ces pauvres hères qui ont besoin du vin pour qu’un repas soit convivial.

Au-delà de ces réactions épidermiques, cette mesure démontre qu’en France on préfère interdire plutôt que laisser le consommateur se responsabiliser. Il est intéressant de rapprocher cette décision du vote la même semaine d’une taxe sur certains vins aromatisés dans le but avoué d’en renchérir le prix et ainsi d’en réduire la consommation. Oui l’alternative à l’interdiction, c’est la taxation.  Pas l’explication.

Pour se faire comprendre du français/consommateur moyen, il faut le frapper au porte-monnaie ou bien le traiter comme un enfant et mettre en place des interdits. Par contre on oublie de faire appel à son intelligence et le responsabiliser. Pour limiter la consommation, on peut éduquer sur la consommation responsable, on peut expliquer sans stigmatiser. D’autres pays le font et ce n’est pas pour cela que la consommation globale d’alcool explose.

Doit-on voir dans cette « interdictionite » une vision philosophique et pessimiste qui a définitivement cessé de faire confiance au bon sens de l’homme ? Il court à sa perte en ayant des comportements mortifères et comme il ne peut entendre raison, ceux qui savent interdisent et sanctionnent. Dans les prochaines semaines d’ailleurs on supprimera les véhicules automobiles puisque les conducteurs ne sont pas raisonnables et continuent à avoir des accidents. On supprimera les téléphones mobiles qui semble-t-il endommagent nos cerveaux….

Si ce n’était simplement par facilité car il est toujours plus facile d’interdire que d’expliquer.

Ceux qui savent, et interdisent ou demandent la taxation, expliquent à mots plus ou moins couverts qu’il faut protéger le consommateur des producteurs de boissons alcoolisées, et principalement de ces grands groupes financiers à la recherche du seul profit, qui avancent masqués et trompent ce consommateur en l’incitant à boire plus que de raison, comme disait l’autre, à l’insu de son plein gré. Le sommet de la perversité, qui est prêtée à ces producteurs, consiste à inciter chacun à moins boire, au nom de la consommation responsable, mais à développer le nombre de consommateurs en éduquant les moins de 18 ans à l’alcool pour en faire des consommateurs en devenir. Et donc au total, en augmentant la base des consommateurs, on augmente les profits. CQFD !

Interdisons encore et toujours, c’est plus confortable et a minima, on ne le reprochera pas à ceux qui ont pris ces décisions. C’est d’effet rapide.

La vie est faite de danger, alors devons-nous l’interdire ?

 

29 octobre 2019

Olivier Poulet

Maitre Olivier Poulet
Avocat au Barreau de Rennes

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