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News
20 septembre 2018

Décidément l’année 2017 est riche en décisions judiciaires pour interpréter la loi Evin.

La dernière en date, rendue le 14 septembre 2017 contre les publicités imprimées sur des bâches cachant les travaux sur l’Hôtel des Monnaies à Paris, apporte une précision importante sur la définition de l’affiche.

Pour les juges, "une bâche d’échafaudage et une affiche outre leurs différences liées à leurs dimensions, sont également distinctes en raison de la matière du support utilisé (le papier pour les affiches, toile pour les bâches), ainsi que de la réglementation applicable. Une bâche d’échafaudage et une affiche constituent donc deux supports différents."

Cette première précision est capitale puisque tout message imprimé sur un autre support que le papier n’est pas une affiche. Et allant plus loin, les juges précisent que la loi Evin "ne permet aucunement la publicité par voie d’affichage dans son ensemble quel que soit le support utilisé pour la publicité, seules les publicités sous formes d’affiches, d’enseignes et affichettes étant autorisées."

Si on suit à la lettre ce raisonnement une affiche imprimée sur un support papier est légale, quel que soit le support sur lequel elle est apposée comme par exemple sur "les abris destinés au public, les kiosques à journaux et autres kiosques à usage commercial, les colonnes porte-affiches ou les mâts porte-affiches," reprenant une énumération du Code de l’environnement. Si elle est imprimée sur autre chose que du papier, ce n’est plus une affiche autorisée.

La loi Evin, qui a pour but la protection de la santé est un texte qui ne peut être sujet à interprétation extensive. Il faut donc ainsi distinguer entre le support de la publicité qui est limitativement énuméré à l’article L. 3323-2 du code de la santé publique et qui ne peut être que l’affiche, (ou l’enseigne, l’affichette et les objets à l’intérieur des lieux de vente à caractère spécialisé), et les supports de ladite affiche qui eux ne s ne sont pas visés par l’article L. 3323-3 du code de la santé publique.

On passera sous silence le fait que les juges semblent sous-entendre que la qualification d’affiche est réservée à des supports de taille réduite, ce qui extrêmement contestable puisque le Code de la santé publique ne comporte rien sur ce sujet.

Opérationnellement, cela signifie que pour les juges, n’est par exemple pas une affiche autorisée, le total covering de véhicule ou des messages de grande tailles imprimés sur des supports de type microfibre.

De manière plus inquiétante cette décision signifie que la loi Evin pourtant imprécise ne souffre aucune interprétation et doit être appliquée à la lettre.

Cela ne fait que rendre encore plus indispensable une adaptation de ce texte aux techniques modernes de communication car on risque de n'avoir plus que des supports non autorisés car obsolètes. Peut-être faut-il en fait y voir l'expression d'un rêve, de moins en moins secret, celui de voir interdite purement et simplement toute publicité pour les boissons alcoolisées.

La décision est consultable dans la partie abonnés d'Alcool & Droit.

20 septembre 2017

Olivier Poulet

Maitre Olivier Poulet
Avocat au Barreau de Rennes

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