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News
20 septembre 2018

Le TGI de Paris a rendu le 24 mai 2017 une très intéressante décision au sujet de la présence de Kronenbourg lors du Festival Rock en Seine en 2014.  Les juges procèdent à un examen très précis, et fondé, des différentes modalités de la présence de cette marque de bière dans un festival musical.

Plusieurs éléments de la décision, en ce qu’ils ont une portée générale, doivent être mis en lumière.

Distinction entre la dénomination sociale et la marque commerciale figurant sur le site internet d’un événement culturel

La mention de la société sur le site internet édité par l’organisateur de l’événement, ne constitue pas une publicité directe interdite dès lors que cette société est mentionnée sous la forme de son logo « Corporate », soit sous sa dénomination institutionnelle, et non pas sous sa marque commerciale et que le lien hypertexte renvoie directement non pas à un site de vente mais à la présentation de l’entreprise.

Cette motivation est particulièrement intéressante pour les sociétés productrices qui comportent dans leur dénomination sociale la marque de la boisson.

La mise en avant de la société dans les publicités dont elle n’est pas responsable ne peut lui être reprochée

L’ANPAA reproche également à la société des publicités pour le festival mentionnant son nom, parues dans le quotidien gratuit 20minutes. Il s’agit d’une publicité pour le festival Rock en Seine sous l’encart publicitaire duquel figure la mention de la société. Outre le fait que ceci apparaît de manière quasi-illisible, cette mention renvoie à la société et non pas à la marque.

Là encore la distinction entre nom de société et marque commerciale est particulièrement intéressante.

L’ANPAA n’est pas fondée à demander la condamnation de la société pour ces publicités dès lors qu’elle ne démontre pas que la société est à l’origine de cette parution, la circonstance de l’absence de contestation par la société à cette parution ne pouvant être analysée comme un accord implicite à cette parution, le silence procédural ne valant pas acquiescement.

Cette motivation, le silence procédural qui ne vaut acquiesement, est importante et peut être étendue à tous les contenus tels que pages facebook ou articles de blogs ou de presse qui évoqueraient une marque mais qui seraient diffusés par un tiers.

Possibilité pour une marque d’alcool d’avoir un espace de réception dans un événement culturel et d’être apposée sur différents endroits de cet espace

Sur plusieurs points, les juges considèrent qu’un producteur de boisson alcoolisée peut parfaitement animer un espace, dédié à sa marque, dans l’enceinte d’un événement puisque qu’ils valident les différents éléments de visibilité de cet espace. 

La mention de la marque sur la pelouse de l’espace géré par ladite marque est conforme aux dispositions de l’article R 3323-4 du code de la santé publique lequel autorise que les objets de toute nature strictement réservés au fonctionnement de l’établissement peuvent évoquer le nom d’une boisson alcoolique, l’ANPAA ne démontrant pas que l’espace géré par la marque était sans limite, ce qui ne ressort d’ailleurs pas du constat d’huissier auquel elle a fait procéder décrivant l’espace et des clichés photographiques annexés à ce constat. Le logo est celui de la société et non celui de la marque.

 Les juges considèrent aussi que les parasols portant la marque et un slogan publicitaire et qui se situaient sur une terrasse sont conforme au Code de la santé publique, l’ANPAA ne démontrant pas que cette terrasse était dans l’espace public, accessible et visible de tous alors même que la société soutient qu’il s’agit d’une zone accessible à aux seuls invités et clients. De même, l’ANPAA ne peut se prévaloir des dispositions de l’article R 3323-3 du code de la santé publique pour critiquer le logo publicitaire de la marque de 1,30m sur 1,60m situé à l’entrée du chapiteau du café car il s’agit d’une enseigne et non d’une affiche dont la taille est réglementée par ces dispositions.

Cette enseigne ne contrevient pas non plus aux dispositions de l’article L 581-18 du code de l’environnement lequel ne prévoit une autorisation que pour les enseignes apposées sur les  immeubles et dans des lieux mentionnés aux articles L 581-4 et L 581-8 de ce code, en l’absence de preuve par l’ANPAA de ce que ce débit temporaire se situait en 2014 dans un tel lieu. 

Il n’y a pas parrainage dès lors qu’il y a un accord commercial

Les juges contestent l’analyse de l’ANPAA qui soutient que la présence de la société et de la marque lors du festival Rock en Seine en 2014 s’analyse en «une opération commerciale de partenariat commercial ». La société étant le fournisseur exclusif dans sa catégorie lors du festival Rock en Seine 2014, on ne peut conclure à une opération de parrainage illicite au sens des dispositions de l’article sus visés, au seul motif de la scène financée par la marque, qui se distingue des produits alcooliques de la marque, les effets publicitaires étant par ailleurs induits du seul partenariat commercial.

Cette démonstration est très intéressante puisque les juges font clairement une distinction entre le partenariat illicite et l’accord commercial aux termes duquel un producteur de boisson alcoolisée est fournisseur, au surplus exclusif, de cet événement.

Je suis bien évidemment à votre disposition pour examiner les conséquences opérationnelles de cette décision notamment dans l’optique de présence d’une marque lors d’un événement culturel.

5 juin 2017

 

Olivier Poulet

Maitre Olivier Poulet
Avocat au Barreau de Rennes

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